qui êtes-vous, Mr Cool?
Il y avait quelque temps que ça me chauffait de raconter les circonstances de la séparation : j’étais parti, j’avais fui à la manière d’un teenager de série télévisée, j’avais pris le parti de quitter une situation que je ne comprenais plus, comme si l’on entretient quoi que ce soit... non, vraiment, j’avais été trop présomptueux, tout s’efface et se liquéfie sous nos yeux ahuris et quoi ? Quelles sont les conditions d’une réponse, etc... ? Tout cela n’est que philosophie et balivernes maintenant, car après que nous avons réalisé notre fantasme, nous restons seuls comme de gros cochons avant l’abattoir, au fond, nous ne sommes responsables que des époques malheureuses...
… je veux dire : ce qui vous importe doit se rapporter à la forme du texte, non pas au fond que vous ne maîtrisez pas plus qu’un ver de terre la pie sournoise et fière de sa puissance, mais qui avale sa proie comme vous avalez le texte, instinctivement.
Je garde un souvenir entier du merveilleux après-midi qui avait secoué notre cœur ; j’avais cru mon heure enfin venue... ce ne fut qu’un mirage, et la réalité avait pris bientôt le pas sur mon illusion après deux mois de cette complicité inattendue, que certain nomme passion. Les yeux forcément encrés dans leur lagon couleur d’olive avaient égaré chacun en un lyrisme égoïste et creux. Je ne pense pas qu’on ait jamais eu le temps de souscrire à l’attention nécessaire aux amours débutantes, mais le feu qui avait mangé le corps naturellement échaudé au soleil de l’été ne nous avait guère laissé de choix : nous nous éprîmes comme le ciel nu comprend la terre craquelée de Wadi Rum, une étreinte répondant à la juste reconnaissance de notre envie.
Deux mois ce n’est pas bien long, deux mois sont deux mois, juillet plus août font soixante-deux jours, bien sûr, seulement on revient toujours aux événements qui nous ont bouleversé pour ce qu’ils nous bouleversent tous les jours suivants... ratiocination de bas étage ? oui et non, oui parce que... et non parce que... mazette ! c’est pas facile à raconter ; j’arrête ici la théorie.
*
Je venais de quitter la table quand j’avais entendu le murmure d’un corps qui pénétrait dans l’eau de la piscine avec la malice particulière aux objets admirés. Pierre d’achoppement de cette impression, la sournoiserie engagée par les danses multicolores de Stéphanie m’invita naturellement à leur représentation. Je me dirigeai donc vers le lieu sensationnel dans l’espoir de vaincre une nouvelle fois l’irrévérence que cette garce commençait déjà à m’inspirer, je m’y dirigeai calmement, et lorsque je franchis la porte-fenêtre de la villa, mon visage retînt tout ce qu’il pût receler d’ennui morne et sec.
Les seins nus de la jeune baigneuse ressemblaient à deux poires qu’on aurait beurrées puis passées au four, si bien que le délicieux spectacle m’offrait maintenant le dessert que j’avais méprisé quelques instants plus tôt : il faut dire que la mère de Stéphanie avait commandé à son pâtissier une putain de forêt noire de merde, bien grasse bien lourde, en plein mois d’août alors que la nouvelle chaleur allégeait assurément l’appétit et que les seuls exercices physiques auxquels il m’était permis de m’adonner ici restaient la nage et l’amour… la nage dans cette piscine bleue et blanche, couleurs de la bourgeoise locale, huit mètres puis on se retourne… la nage donc… et l’amour.
J’allumai le joint d’herbe que j’avais adroitement roulé ce matin dans la chambre confortable de Stéphanie. Un joli cône bien droit bien fort qui découvrirait en un rien de temps le plaisir exotique des après-midi oisifs. Et puis cet orgueilleux soleil libéra une fantaisie assez smart pour qu’elle perdomine notre mémoire si cultivée et si sincère… je t’assure… comment te dire… ça a un parfum de Mondrian… tu sens pas ? Pourtant, ce jaune et ce rouge et ce bleu qui se marient si bien dans ce cadre à l’opacité envoûtante… Stéphanie restait Stéphanie : une artiste ratée.
Je m’approche de la belle qui remarque ma présence je m’agenouille elle vient comme une petite chienne se faire caresser je lui caresse un sein le joint paraît se consumer automatiquement j’effleure la chair ma vue se brouille la peau s’attendrit avec l’eau bleue de la piscine le sein réagit à mes attouchements je reste fier devant cet accomplissement mais elle décide de poursuivre le sport alors je me relève, jette le mégot à travers le grillage qui nous sépare de voisins retraités que la chaleur désoblige, et retourne dans le salon. Une partition de Schubert trône sur le piano fermé. Je sais bien que personne ne l’ouvre jamais ce piano ; Stéphanie avait voulu apprendre pendant un an mais ça c’était pas bien passé, le professeur particulier aurait été trop sévère aux dires de sa mère… tu parles ! Elle était oui incapable de rien apprendre, c’était plutôt ça… moi je m’assois et commence andante une Nocturne de Benjamin Britten peut-être aurais-je dû rester avec elle nager à ses côtés la caresser sous l’eau on serait allé dans sa chambre elle m’aurait sucé et je l’aurais mangé avidement l’aurais pénétré on aurait jouit voilà comme tous les jours…
Nous nous quittâmes quelques jours plus tard. L’été avait passé.
7 commentaires:
Je bande!
qui es-tu anonyme? qui est caché derrière ce pseudo ô combien impertinent et qui en dit long sur la sincérité de tout discours exporté!
ps: si t'es un garçon tu ne m'intéresses pas!
je soupçonne Mr de Montceau d'être l'anonyme qui hante ce blog au demeurant fort bien achalandé...
bloggers de tous pays, unissez-vous!
Qu'est-ce que c'est que cette histoire Mr l'anonyme?
vous m'accusez et en plus vous demeurez sans identité! Que c'est bas tout ça. Une célèbre formule montcellienne dirait: "C'est la taupe qui piaille qu'a fait le zeuf!"
Bref, à l'heure on vous êtes sans aucun doute victime de panne chibrique (ma grand-mère vous prescrirait une omelette à l'amidon), tout comme l'anonyme au dessus de votre commentaire je ne cache pas mon excitation non dissimulée à la lecture de ce superbe texte. Mr Cool est un excellent conteur et manipulateur de mots aux relans fort batailliens...longue vie à l'Eros qui "hante" sa poésie.
zaï zaï zaï zaï
Superbe.
Très bien Mr cool , votre histoire me fait penser à une petite nouvelle Ethan Coen intitulé " Les portes du ciel " ( tire du bouquin "J'ai tué Phil Shapiro" ). Peut etre pas de la grande litterature mais très divertissant.D'après mes souvenirs, le personnage de cet histoire decouvrait un jardin paradisiaque a l'arriere d'un enorme ranch ( avec une petite plage, une petite baie ... )avant de draguer la propriétaire ( sorte de femme fatale ) . C'est très mal expliqué la , mais bref ca m'y fait penser.
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